Acharnement de l’herbe
Être arrachée
D’un lit de terre qu’on a réussi à apprivoiser,
Un balbutiement où la vie vacille,
Voyelles qui appellent de directions opposées.
Si l’herbe ne revient plus.
Absence qui change les rapports avec l’infini.
« … je ne sers plus à rien…
Quelles épreuves! » et le vent et le vent qui nous égare.
Partons, il y a des feux partout. Mutti*, viens,
Le train arrive. Sauvons-nous.
Une herbe solidement enracinée,
Obstinée nous tient.
D’un sol à l’autre
La racine s’acharne
En profondeur,
Se hisse enfin une hampe. Une lampe.
*"maman" dans le patois du Voralberg (Autriche)
Accanimento dell’erba
Essere strappata
Da un letto di terra che siamo riusciti a domare,
Una balbuzie dove la vita vacilla,
Vocali che invocano direzioni opposte.
Se l’erba non torna.
Assenza che cambia i rapporti con l’infinito.
“… Non servo più a niente…
Quali affanni!” e il vento e il vento ci smarrisce.
Andiamo, vi sono fuochi ovunque. Mutti*, vieni
Il treno è in arrivo. Scappiamo.
Un’erba tremendamente ancorata,
Ostinata ci costringe.
D’un terreno all’altro
la radice persevera
In profondità,
Si drizza infine un gambo. Una lampada.
* “Mamma”, nel vernacolo di Voralberg (Austria)
Herbe sur argile
Un bloc
Avec un mot en trop
Qui empêchera l’herbe de pousser.
J’ai un outil à deux dents, je pioche
Où l’argile se colle.
Là je ne rencontrerai
Personne qui comprend.
Malgré tout peut-être se lèvera
Sur un bloc une autre vie
Juste à la limite,
Avant que ne s’effondre
Toute la motte soulevée par l’acier
De mon outil brutal entre quelques mots.
Le12 mars les jardiniers de la ville
Ont coupé l’herbe en brosse.
Un devant de poème sur argile
Derrière les barreaux.
Erba su Argilla
Un macigno
Con una parola in eccedenza
Che impedirà all’erba di crescere.
Ho un attrezzo con due denti, zappo
Dove s’incolla l’argilla.
Lì non incontrerò
Nessuno che capisca.
Nonostante tutto forse si alzerà
Un’altra vita sopra un macigno
Fino al limite,
Prima che crolli
Tutta la zolla sollevata dall’acciaio
Del mio brutale attrezzo in mezzo a parole.
Il 12 marzo i giardinieri della città
Hanno tagliato l’erba a spazzola.
Un fronte di poesia su argilla
Dietro le sbarre.
Herbe et bitume
La machine aux engrais
Rejette vapeurs et fumées.
Déjections projetées avec violences verticales.
Molécules. Atomes. Trajectoires retombantes,
Grappes acides atteignant le sol.
Près.
Sur.
Le bitume,
Avec un rythme fou de bagnoles,
Croisées, décroisées. Arrêts. Démarrages.
Sur l’espace étroit entre l’auto-route
Et l’usine, herbe courage, herbe de cœur,
De caractère, droite,
Majuscule, minuscule, virgule et parenthèses,
Élégamment penchée dans la poussière.
Hors de l’esclavage des phosphates
Quelques mots, herbe entre guillemets,
« L’indispensable présence gracieuse »
Pour dégager
Un espace de liberté.
Erba e bitume
La macchina dei concimi
Sputa vapori e fumi.
Deiezioni scagliate con verticali violenze.
Molecole. Atomi. Traiettorie ricadenti,
Grappoli acidi che toccano il suolo.
Vicino.
Sul.
Bitume,
Con un ritmo sfrenato di macchine,
Incrocio, disincrocio. Fermata. Ripartenze.
Sullo spazio stretto tra l’autostrada
E l’officina, erba coraggio, erba di cuore,
Di grinta, dritta,
Maiuscola, minuscola, virgola e parentesi,
Signorilmente chinata nella polvere.
Fuori dalla schiavitù dei fosfati
Qualche parola, erba tra virgolette,
“L’indispensabile presenza graziosa”
Per liberare
Uno spazio di libertà.
Herbe rustique
On ne cherche pas la vérité avec elle
On la trouve.
C’est absolument le matin
Puis le soir irréductible.
Seuls en face de l’énigme : herbe !
On peut la feuilleter en tous sens,
Vieux livre de la terre
Avec des passages qui nous brûlent d’attendrissement.
Leste, preste, elle orne fougueusement
Le sol sans marge.
C’était justement la page du poème,
Page à laquelle je songeais. Cela devenait
Bruissant, rond dans l’insomnie.
Une herbe rustique. Ô surprise !
Il faudra que je te révèle. A une vitesse folle
Tu envahis les mots et charme le silence,
Le gris des jours. Herbe irréductible…
… Qui sourit de nos hésitations.
Erba rustica
Mai cercare la verità con lei
La si trova.
È in assoluto il mattino
Poi la sera irriducibile.
Soli di fronte all’enigma: erba!
La si può sfogliare in tutti i sensi,
Vecchi libri della terra
Con passaggi che ci avvampano di tenerezza.
Lesta, svelta, impreziosisce con impeto
Il suolo senza margine.
Era appunto la pagina della poesia,
Pagina alla quale pensavo. Che diventava
Fruscio, tondo nell’insonnia.
Un’erba rustica. Oh sorpresa!
Dovrò rivelarti. A folle velocità
Invadi le parole e incanti il silenzio,
La cupezza dei giorni. Erba irriducibile…
… Che delle nostre titubanze sorride.
Une planche dans mes herbes
Toujours il me faut des feuilles
Quand je rentre. Le froid est à son comble,
Il gèle sur les herbes. Dans la désertion
Je grignote enfin quelques syllabes.
Une invasion d’herbes diverses
Rejoint l’espace presque désert
Sous le cèdre magnifique de l’espace vert
Qui se dresse devant ma feuille.
Sur du papier raisin
Quelques graminées au ras de la vie s’élancent.
Employée de la poésie je choisis les graines :
« Tentative de générosité »
Et ensemence une nouvelle planche de mots.
Un’asse nell’erbe mie
Ho sempre bisogno di foglie
Quando torno. il freddo è al culmine,
C’è brina sull’erbe. Nello smarrimento
Rosicchio infine poche sillabe.
Erbe varie a bizzeffe
Raggiungono lo spazio quasi desertico
Sotto il solenne cedro dell’area verde
Che si drizza davanti al mio foglio.
Su carta in filigrana
Sull’orlo della vita si lanciano graminacee.
Impiegata della poesia scelgo i semi:
“Prova di generosità”
E inseminare un’asse nuova di parole.
Herbe sans haine
L’herbe n’ harangue ni le « bas » peuple
Ni celui qui passe par hasard,
Non plus celui ou celle qui l’ont rêvée, attendue
Puis arrivent avec des désespoirs.
La misère, la mort, le tout-venant,
Le coffre-fort, la talonnette, le prozac et le chien,
Difficile de poursuivre le voyage entre les mondes
Sans billet d’aller et retour,
Sans
Un peu
D’
Herbe hospitalière.
Erba senz’odio
L’erba non fa prediche né al popolino
Né a quello che passa per caso,
Neppure a colui o colei che l’hanno sognata, attesa
Che poi arrivano e si disperano.
La miseria, la morte, l’ultimo venuto,
La cassaforte, il soprattacco, il prozac e il cane,
Difficile continuare il viaggio tra i mondi
Senza biglietto di andata e ritorno,
Senza
Un po’
D’
Erba ospitale.
Pissenlits
Bande de campagne tassée
Sur un bord de terre,
Longeant une route où se croisent indéfiniment
Des moteurs près d’immeubles utilitaires.
Un bord de terre avec deux ou trois herbes,
Pissenlit au nom impossible
Avec une multitude de dents de lion
Eclatantes, épanouies.
Le jaune, si difficile à classer,
En haut de tiges longues violacées
Sur le sol d’argile claire, dure,
Percute le doré des pétales entre les feuilles dentelées.
Rêve agité de corolles obstinées
Qui ouvre une brusque éclaircie en chacun de nous.
Rythmes en résonances d’un monde à part,
Ruelle de quelques mots avec des dents de lion.
Tarassaco
Striscia di campagna premuta
S’un bordo di terra,
Lungo una strada dove s’incrociano all’infinito
Motori vicini a condomini.
Un bordo di terra con due o tre erbe,
Piscialetto dal nome impossibile
Con una moltitudine di denti di leone
Smaglianti, schiusi.
Il giallo, così difficile da classificare,
In cima a steli lunghi violacei
Sul suolo d’argilla chiaro, duro,
Percuote il dorato dei petali tra foglie dentellate.
Sogno agitato di corolle ostinate
Che apre una brusca schiarita in ciascuno di noi.
Ritmi in risonanza d’un mondo a sé,
Vicoli di poche parole con denti di leone.
da ... s'il n'y avait pas d'herbe
si la poésie n'existait plus..." (Ed.La Rumeur Libre)
Ballade de l'errance
J'ai suivi l'homme qui erre dans la rue.
Il parle. Ne s'adresse à personne.
Un homme fait le trottoir
De là à là. Tous les jours. De là à là.
Une gouttière mène au caniveau
Du caniveau jusqu'au mal de lui - même.
Seul dans un vestibule de mort.
Je lui donne des mots aussi ailés que l'amour.
Je suis descendue jusqu'à ce pays
Sans reprendre haleine.
Sur cette terre lointaine
Plus lointaine que les cieux.
Ecarter les mots,
Les écarteler dans le poème,
Garder leur gravité dans la consolation de nos paroles.
Ballata dell’erranza
Ho seguito quest’uomo che erra per la strada.
Egli parla. Non si rivolge a nessuno.
Un uomo fa il marciapiede
Da lì a lì. Ogni giorno. Da lì a lì.
Una grondaia porta alla fogna
Dalla fogna fino al male di se stesso.
Solo in un vestibolo di morte.
Gli do parole alate quanto l’amore.
Sono scesa fino a questo paese
Senza riprendere fiato.
Su questa terra lontana
Più lontana dei cieli.
Allontanare le parole,
Allargarle nella poesia,
Conservare la loro gravità nella consolazione delle nostre parole.
Ballade des chaussettes en laine tricotées par Renate
Par ailleurs j'écris.
J'ai des chaussettes. Il y a du feu,
Du soleil. J'ai froid.
J'entends des enfants qui crient, solitude et détresse.
Par ailleurs, j'écris encore.
Je n'ai pas faim. J'ai soif,
Soif d'eau pure,
Quand tu ouvres les mots pour me faire signe.
J'écris encore par ailleurs,
Dans le Sud brûlant des tissus flottants, avec les chaussettes
De Renate. Vents sur luge, sur le bigos
Où le langage n'a pas de carte d'identité.
Par ailleurs j'écris dans la fragilité de l'instant avec mes chaussettes.
Je suis seule, porte ouverte ou fermée,
Renate tricotera toujours les chaussettes rouge et bleu.
Presque tout reste à écrire. A réécrire.
Ballata dei calzini di lana sferruzzati da Renata
Peraltro scrivo.
Ho dei calzini. C’è fuoco,
Sole. Ho freddo.
Sento bambini che gridano, solitudine e angoscia.
Peraltro, scrivo ancora.
Non ho fame. Ho sete,
Sete d’acqua pura,
Quando apri le parole per farmi un cenno.
Scrivo ancora peraltro,
Nel Sud rovente delle stoffe ondeggianti, con i calzini
Di Renata. Venti di slitta, sul bigos
Dove il linguaggio non ha carta d’identità.
Peraltro scrivo nella fragilità dell’istante con i miei calzini.
Sono sola, porta aperta o chiusa,
Renata sferruzzerà sempre i calzini rossi e blu.
Quasi tutto da scrivere. Da riscrivere.
Ballade de la casserole du Sahel
Si nous avons une casserole
Pleine d'eau
Nous allons rire de bonheur.
Mais la casserole est vide.
Mais la casserole est sèche.
Et nous avons tous soif. Et vous ?
La casserole pleine d'eau
Est une planète étoilée qui se penche.
Verse ! Verse ! Ombre de nuages, mots,
Appelez la harpe qui répond aux tambours.
Que fais-tu avec tes mains qui quémandent.
Ils ont soif. Et vous ?
L'eau.
Un peu d'eau.
Plus d'eau.
Eau. Encore un peu d'eau.
Eau. Implorer de l'eau.
Soif. Soif. Soif. Ils ont soif. Et vous ?
Une vieille femme remue la vaisselle d'un continent.
Un milliard de marmites lavées avec une goutte d'eau.
L'enfant la boit. Il marche dans la poussière.
Les pieds, les ongles, le sang sur la terre brûlante.
Je n'ai presque plus de mots. Soif. Et vous ?
Ballata della casseruola del Sahel
Se abbiamo una casseruola
Piena d’acqua
Ridiamo di felicità.
Ma la casseruola è vuota.
Ma la casseruola è asciutta.
E tutti abbiamo sete. E voi?
La casseruola piena d’acqua
È un pianeta stellato che si china.
Versa! Versa! Ombra di nuvole, parole,
Chiamate l’arpa che risponde ai tamburi.
Che cosa fai con le tue mani elemosinanti?
Hanno sete. E voi?
L’acqua.
Un po’ d’acqua.
Più acqua.
Acqua. Ancora un po’ d’acqua.
Acqua. Implorare l’acqua.
Sete. Sete. Sete. Hanno sete. E voi?
Una donna vecchia smuove le stoviglie d’un continente.
Un miliardo di pentole lavate con una goccia d’acqua.
Il bambino la beve. Cammina nella polvere.
I piedi, le unghie, il sangue sulla terra rovente.
Non ho quasi più parole. Sete. E voi?
Ballade des poiriers contre les murs de Frontignan et Campodimele
Là tu me montres ce que je voulais voir,
Une lumière apparaissant
Dans le silence des pierres sèches.
Ce que j’eus voulu garder toujours.
Là tu me donnes
Un immense lieu d’amour
Avec un cavalier qui me saisit au vol.
Toujours ce que j’aurai voulu recevoir.
Là mon âme est employée
De l’aube au couchant
Captive de ton baume.
Ce que je voulus toujours avoir.
Là, au-dessous du poirier en fleurs,
Ma couche, tous mes amants
Avec les bruissements d’un champ de miel qui exhale.
Toujours, ceux que je voudrais revoir
Quelque élevée que soit la terre, je risque mes mots ici –bas.
Les branches ouvertes d’un poirier dans l’air
Si pur me pare de vêtements légers.
Ce que j’ai voulu toujours pour émouvoir.
J’entends tes pas que j’avais oubliés.
La vie m’emporte une fois encore,
Je ne touche plus les murs, je serre le vieux poirier.
Celui que j’eusse voulu planter toujours avec savoir.
Un vieux poirier, à Campodimele, à Frontignan,
Et près de vous les contempler.
Toujours ce pouvoir, c’est ce que je veux.
Ballata dei peri contro i muri di Frontignan e Campodimele
Qui mi dimostri ciò che volevo vedere,
Una luce che appare
Nel silenzio dei muretti a secco.
Ciò che avrei voluto conservare sempre.
Qui mi dai
Un immenso luogo d’amore
Con un cavaliere che mi coglie al volo.
Sempre ciò che avrei voluto ricevere.
Qui la mia anima è occupata
Dall’alba al tramonto
Prigioniera del tuo balsamo.
Ciò che volli sempre avere.
Qui, al di sotto del pero in fiore,
Il mio letto, tutti i miei amanti
Con il brusio d’un campo di miele che svanisce.
Sempre, ciò che vorrei rivedere
Per quanto elevata sia la terra, metto a repentaglio le mie parole quaggiù
I rami aperti di un pero in aria
Così puro mi agghindo di abiti leggeri.
Ciò che sempre ho voluto per commuovere.
Sentivo i tuoi passi che avevo dimenticato.
La vita mi rapisce una volta ancora,
Non tocco più i muri, stringo il vecchio pero.
Quello che avrei voluto piantare sempre con competenza.
Un vecchio pero, a Campodimele, a Frontignan,
E vicino a voi contemplarli.
Ancora quel potere, è ciò che voglio.
da Délicatesse et gravité (Ed. Rougerie)
La mine d'or
A la surface de la terre une femme
A la surface d'une terre une autre femme
A la surface de notre terre des femmes
A la surface de sa terre
Une femme
Creuse.
*
A la surface de la terre
A la surface d'une terre
A la surface de notre terre
A la surface de sa terre
La mine d'or.
*
Elle creuse. Elle a creusé
Depuis si longtemps
Depuis sa naissance
Depuis des années
Depuis des mois
Voulez-vous savoir ?
C'est la même.
C'est la même qui survit
C'est la même qui n'a pas de calendrier
qui n'a pas d'horloge
C'est la même qui ne sait pas où ça commence
C'est la même qui ne sait pas où ça finit.
*
Elle ne veut pas.
Elle ne veut pas mourir
Pas perdre
Elle ne veut pas comprendre
Elle ne veut pas demander
Elle ne veut pas abandonner.
*
Vous voulez savoir
Qui l'a condamnée
Qui l'a effacée
Qui l'a obligée
Repoussée
Qui l'a séparée
Qui l'a désignée.
Vraiment.
Vraiment est-elle vivante
Vraiment est-elle sur un rebord
Vraiment est-elle de notre terre
Est-elle de là
Vraiment est-elle de là ou de là bas.
Voulez-vous encore savoir
*
Elle doit avoir une mémoire
Elle doit avoir une âme
Une raison
Elle doit avoir des amours
Elle doit avoir des règles
Elle doit avoir des secrets.
A -t- elle des doutes
Le devoir d'être
Au milieu d'un rêve
Où tout serait en or.
*
Elle sait faire des gestes
Elle sait regarder au loin
Elle sait s'immobiliser
S'acharner
Elle sait accoucher
Elle sait montrer
Elle sait.
Elle tamise le temps
Elle tamise la vie
Elle tamise la terre
Elle tamise la mort
La désolation
Elle tamise le silence
Elle tamise.
*
Elle tient une vieille boîte
Une guenille
Elle tient l'aube
La nuit
Elle tient le monde
Elle tient le jour
Elle tient tous les jours
Elle tient.
Voulez-vous savoir toujours
*
Un visage
C'est très peu d'or
A peine un petit mélange de boue
Avec une poussière dorée.
Un air de rien
Au milieu du désert
Dans les mots
Pour ne pas écrire la mort
Au-dessus de la tête
D'une vie.
La miniera d’oro
Sulla superficie della terra una donna
Sulla superficie della terra un’altra donna
Sulla superficie delle nostre terre donne
Sulla superficie della sua terra
Una donna
Scava.
*
Sulla superficie della terra
Sulla superficie d’una terra
Sulla superficie della nostra terra
La miniera d’oro.
*
Ella scava. Ha scavato
Da così tanto tempo
Dalla sua nascita
Da anni
Da mesi
Volete sapere?
È la stessa.
È la stessa che sopravvive
È la stessa che non ha calendario
Che non ha orologio
È la stessa che non sa da dove inizia
È la stessa che non sa dove finisce.
*
Non vuole.
Non vuole morire
né perdere
Non vuole capire
Non vuole chiedere
Non vuole abbandonare.
*
Volete sapere
Chi l’ha condannata
Chi l’ha cancellata
Chi l’ha obbligata
Respinta
Chi l’ha separata
Chi l’ha indicata.
Davvero.
Davvero è viva
Davvero è sopra un davanzale
Davvero è della nostra terra
È di quaggiù
Davvero è di quaggiù o di laggiù.
*
Volete ancora sapere
Avrà une memoria
Avrà un’anima
Una ragione
Avrà amori
Avrà delle regole
Avrà dei segreti.
Avrà dubbi
Il dovere di essere
In mezzo a un sogno
Dove tutto sarebbe d’oro.
*
Ella sa fare gesti
Ella sa guardare di lontano
Ella sa bene immobilizzarsi
intestardirsi
Ella sa partorire
Ella sa mostrare
Ella sa.
Ella setaccia il tempo
Ella setaccia la vita
Ella setaccia la terra
Ella setaccia la morte
La desolazione
Ella setaccia il silenzio
Ella setaccia.
*
Ella custodisce una vecchia scatola
Uno straccio
Ella afferra l’alba
La notte
Ella afferra il mondo
Elle afferra il giorno
Ella afferra ogni giorno
Lei afferra.
Volete sempre sapere
*
Un volto
È pochissimo oro
Appena un piccolo miscuglio di fango
Con una polvere dorata.
Un'aria da poco
Nel mezzo al deserto
Nelle parole
Per non scrivere la morte
Al di sopra della testa
D’una vita.
da Chant du rivage de la Sirba, Ed. Le temps des Cerises
Tenson douce près du ruisseau Lagamas
Le miracle sincère
des violettes
sur les berges
du ruisseau Lagamas
me font oublier
les jours d'hier.
Un temps
sans étau.
Je conduis la cascade
aux vibrations de harpe
jusqu' à la poussière.
C'est l'instant de partir vers les terres désertes sans feuilles. Ni mortes. Ni vives. L'homme qui porte un turban descend de son chameau. Il dit que l'univers n'a jamais vieilli. Nous conversons au bord du vide. Il ajoute que sa mort ne changera rien au vaste monde. L'écouter c'est encore durer. Il caresse mon épaule nue. Je sens les crevasses de sa peau. Je lui tends l'eau du Lagamas.
Dolce tenzone vicino al ruscello Lagamas
L’onesto miracolo
delle viole
sulle sponde
del ruscello Lagamas
mi fa dimenticare
le giornate d’ieri.
Un tempo
che non opprime.
Conduco la cascata
alle vibrazioni dell’arpa
fino alla polvere.
È il momento di partire verso le terre deserte senza foglie. Né morte. Né vive. L’uomo che porta un turbante scende dal suo cammello. Dice che l’universo non è mai invecchiato. Chiacchieriamo sull’orlo del vuoto. Aggiunge che la sua morte non cambierà niente al vasto mondo. Ascoltarlo è durare ancora. Accarezza la mia spalla nuda. Percepisco le ragadi della sua pelle. gli allungo l’acqua del Lagamas.
da Résurgences du ruisseau Lagamas dans le désert, Ed. Jorn
Le café espagnol
Une halte
est-elle si souvent
recherche.
Pauvre. Dévastée. Ruelle.
En larges lettres cramoisies
déteintes
vous aviez peint au-dessus du vantail
« Cantar hacia afuera
o adentro »
Je cherchai une halte.
Je suis rentrée dans le café espagnol.
« chanter en dehors
ou en dedans »
Lorsqu'ils fouilleront ma voix
ils trouveront la nuit
un lys blanc
si pâle
qu'il semble larmes.
Derrière les stores baissés
je me cache pour écrire.
Les mégots et les capsules
ne sont pas balayés les carreaux rouges.
La tapisserie fut jaune
Elle est défraîchie.
Par la fenêtre
le fleuve trace un paysage
vie longue, lumineuse
insaisissable.
*
Dans le café espagnol
j'écris toujours le dernier poème.
Un poème brisé
qui comprend mal
qui sait mal
souffrir
avec une porte
qu'on ne peut ouvrir
ni fermer.
Je ne peux pas sortir
du café espagnol.
Je m'approche du seuil
un acre nuage de fumée
m'empêche de poser
les yeux
sur un point extrême
du monde.
Je me parle toute seule
je me dis de rentrer.
Toujours la même solitude
alors que je voulais
vous adresser une parole.
*
Sur le comptoir
une tache de vin
dessine une rose
de sang.
Le dernier client
l'a tracée
avec une paille.
C'est avec elle
que j'ai écrit
pour le plus dénué des hommes
en rentrant ici
incognito.
Passer.
Rester
dans quelques mots.
Instant de cosmos en fleur
tandis que la mort
guette dans son piétinement
ceux qui chantent
en dehors
et en dedans.
Je m'attache à la fenêtre
du café sans issue.
Derrière le store baissé
je regarde le fleuve
il déborde souvent.
Il caffè spagnolo
Una sosta
è così spesso
ricerca.
Povera. Sfregiata. Vicolo.
In larghe lettere cremisi
stinte
avete dipinto al di sopra del ventaglio
«Cantar Hacia afuera
o adentro»
Ricercavo una sosta.
Sono entrata nel caffè spagnolo.
«cantare in fuori
o in dentro»
Quando frugheranno la mia voce
troveranno la notte
un giglio bianco
così pallido
da sembrare lacrime.
*
Dietro le persiane abbassate
mi nascondo per scrivere.
Le cicche e le capsule
non sono spazzate
sulle piastrelle rosse.
La tappezzeria fu gialla
È sbiadita.
Dalla finestra
il fiume traccia un paesaggio
vita lunga, luminosa
inattingibile.
*
Nel caffè spagnolo
scrivo sempre l’ultima poesia.
Una poesia franta
che mal capisce
che malamente
sa soffrire
con una porta
che non si può aprire
né chiudere.
*
Non posso uscire dal
caffè spagnolo.
Mi avvicino alla soglia
un’acre nube di fumo
m’impedisce di posare
gli occhi
sopra un punto estremo
del mondo.
Mi parlo da sola
mi dico di rientrare.
Sempre la stessa solitudine
mentre volevo
rivolgervi una parola.
*
Sul bancone
una macchia di vino
disegna una rosa
di sangue.
L’ultimo cliente
l’ha tracciata con una pagliuzza.
È con essa
che ho scritto per il più insensato degli uomini
tornando qui
in incognito.
Passare.
Rimanere
in alcune parole.
Istanti di cosmo in fiore
mentre la morte
spia nel suo calpestio
coloro che cantano
in fuori
e in dentro.
Mi fisso alla finestra
del caffè senza uscita.
Dietro la persiana abbassata
guardo il fiume
che spesso tracima.
da L'employée de la poésie (Rougerie)
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