Je meurs d’amour et de colombes, Je meurs de mémoire et d’invention, Je meurs des pleurs d’une jonquille, Mais le Paradis une fois, Mais le Paradis une fois... Je suis malade des orties bleues, malade des statues qui transpirent, Malade de l’horreur des caves et des odeurs de caniveaux, Je suis malade de vous aimer, surtout quand vous ne m’aimez pas, Je suis malade de mon cerveau, je suis malade de ne pas l’être. Je meurs dans le rire du vent, Je meurs de morsure et de joie, Je meurs à en perdre la tête, Mais le Paradis une fois, Mais le Paradis une fois... Je meurs dans les violettes sauvages, Je meurs dans le cœur d’un inuit, Je meurs d’amour sur la banquise, Je meurs et voudrais me cacher. Mais dans mes veines, le Paradis Je crève de ces souffrances que l’on ravale, de ces souffrances qui nous étranglent Je crève aux portes de la conscience je crève de mon frère brûlé Et je crève d’avoir si peur que j’en tremble Je crève de ne jamais rien comprendre du rire des oiseaux moqueurs je crève de mon non-suicide je crève en milliards de morceaux J’ai coupé mon souffle au papier carbone J’ai coupé les ancres les encres et puis mon sang J’ai coupé des morceaux de verre et j’en ai fait des vers pilés puis je m’en suis frotté le corps et j’en ai plein sur le visage j’en ai tout autant dans le cœur pour que plus jamais l’on oublie et pour que personne n’efface que je suis malade de vous J’entends le ciel qui se fissure… Je meurs d’amour et de colombes, Je meurs d’ivresse, et d’invention, Je meurs dans un battement d’ailes, Mais le Paradis une fois mais, Le Paradis une fois mais le, Paradis une fois mais le Paradis, Une fois mais le Paradis une, Fois mais le Paradis une fois, Mais le Paradis en pleine figure parce que je n’ai pas fini de vous aimer, Parce que la vie des roses m’est précieuse ; A cause aussi des nuits dans les étoiles, des heures entières auprès de vous : Mais le Paradis une fois, Le Paradis au creux de vos bras, Le Paradis tout contre moi : Et dans mes veines…
Muoio d’amore e di colombe, muoio di memoria e d’invenzione, muoio dei pianti d’una giunchiglia, ma il Paradiso une volta, ma il paradiso una volta… Sono malata delle ortiche azzurre, malata delle statue che sudano, malata dell’orrore delle cantine e degli odori di cunicoli, sono malata di amarti, soprattutto quando non mi ami, sono malata del mio cervello, sono malata di non esserlo. Muoio nella risata del vento, muoio del morso e di gioia, muoio fino a perderne la testa ma il Paradiso una volta, ma il Paradiso una volta… Muoio nelle violette selvatiche, muoio nel cuore di un eschimese, muoio d’amore sulla banchisa, muoio e vorrei nascondermi. ma nelle mie vene, il Paradiso. Crepo di queste sofferenze che ingoiamo, di queste sofferenze che ci strangolano crepo alle porte della coscienza crepo del mio fratello bruciato e crepo d’aver così paura da tremarne crepo di non capire mai niente della risata degli uccelli beffardi crepo del mio non-suicidio crepo in miliardi di schegge ho tagliato il mio respiro alla carta carbone ho tagliato le ancore gl’inchiostri infine il mio sangue ho tagliato pezzi di vetro e ne ho fatto versi pestati poi mi sono strofinata il corpo e ne ho dappertutto sul volto ne ho altrettanto nel cuore perché mai più si dimentichi e affinché nessuno cancelli che sono malata di te. Sento il cielo spaccarsi… muoio d’amore e di colombe, muoio d’ubriachezza, e d’invenzione, muoio in un battito d’ali, ma il Paradiso una volta ma, il Paradiso una volta ma il, Paradiso una volta ma il Paradiso, una volta ma il Paradiso una, volta ma il Paradiso una volta, ma il Paradiso in piena faccia perché non ho finito di amarti, perché la vita delle rose mi è preziosa; anche a causa delle notti nelle stelle, delle ore intere vicino a te: ma il Paradiso une volta, il Paradiso nel cavo delle tue braccia, il Paradiso tutto contro di me: e nelle mie vene…
da Le Paradis une fois (Éditions du soir au matin, 2009)
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Donne-moi, donne-moi, offre-moi ta voix… Ta voix, ose me l’offrir, toi… Ta voix ma voix, mélanger nos voix… Offre-moi, donne-moi… Moi ? Moi m’offrir moi… Moi m’offrir, et ma voix… Ma voix elle ose, venir pour toi… Ma voix, qui pour toi, ose… Elle ose ma voix, oui, elle ose, du bout des doigts, offrir tout moi… Ma voix me donne mieux que moi. C’est du bout de la voix que je m’offre, et toi pareil, et tous les autres…
Parce que tout s’offre avec la voix… Avec la voix, toi jusqu’à moi, et moi sur le bout de ta langue… Avec la voix, moi mon corps nu… La voix, la voix, LA VOIX ! LA VOIX POUR NE PLUS S’ÉCOUTER ! Offre-moi, donne-moi, prends-moi.
Sans angoisse et sans peur : se mélanger les voix. A l’intérieur, dans les influx nerveux, dans l’os blanc et dans l’ombre : La voix ! Et dans l’obscurité des origines : La voix encore, toujours la voix, qui se déplie jusqu’au silence ! Jusqu’au silence elle se brise, elle se fragmente : MUSIQUE !
La voix, la voix… Le chant des femmes dans le désert… La voix quand elle se dresse face vide et que claquent les mains sur les tempes !
La voix, oui, quand seule elle ose, insaisissable, hurler son ciel hurler encore parce que tout s’éparpille… Tout s’éparpille, tout dans moi qui s’éparpille mais la voix, la voix me rappelle en cachette, elle me parle malgré moi, malgré moi c’est la voix qui m’emporte, qui m’emporte, qui…
Donne-moi, donne-moi ta chair vive, des envies d’œuvres d’art. Ta voix offre-la moi.
Juste une fois, ta voix, que je l’entende…
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Dammi, dammi, offrimi la tua voce… La tua voce, osa offrirmela, tu… La tua voce la mia voce, mischiare le nostre voci… Offrimi, dammi… Io? Io offrirmi io… Io offrirmi, e la mia voce… La mia voce osa, venire per te… La mia voce, che per te osa… Osa la mia voce, sì, lei osa, in punta di dita, offrire tutta me stessa… La mia voce mi offre più di me. È in punta di voce che mi offro, e tu idem, e tutti gli altri…
Perché tutto si offre con la voce… Con la voce, te fino a me, e io sulla punta della tua lingua… Con la voce, io il mio corpo nudo… La voce, la voce, LA VOCE! LA VOCE PER NON PIÙ ASCOLTARSI! Offrimi, dammi, prendimi.
Senza angoscia e senza paura: mescolarsi le voci. All’interno, nei flussi nervosi, nell’osso bianco e nell’ombra: la voce! E nell’oscurità delle origini: La voce ancora, sempre la voce, che si dispiega fino al silenzio! Fino al silenzio lei si spacca, si frammenta MUSICA!
La voce, la voce… Il canto delle donne nel deserto… La voce quando si drizza faccia vuota mentre schioccano le mani sulle tempie!
La voce, sì, quando lei sola osa, inafferrabile, gridare il suo cielo urlare ancora perché tutto si sparpaglia… Tutto si sparpaglia, tutto in me che si sparpaglia ma la voce, la voce mi richiama di nascosto, lei mi parla mio malgrado, mio malgrado è la voce che mi porta via, che mi porta, che…
Dammi, dammi la tua carne viva, brame d’opere d’arte. La tua voce dammela.
Solo una volta, la tua voce, ch’ io l’afferri…
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Un fou parle seul à ma place – Un fou parle seul à ma place, il dit ce qu’il me manque à dire – Il parle haut et fort, et ça me dévisage – Il parle haut et fort et moi, je le répète – Je répète ses mots mandibules – Je répète – Je crache des os – Je répète – Je crache des os – J’aggrave – Aggraver pousse les limites – L’incise est redoutable – Parfaite la tremblance : du manque à dire – Du manque à dire – Du manque à dire me tient debout – Je tiens debout par le silence – Je hurle le cri blanc, la flèche – Je crispe le soleil dans mes mains : La ligne frontale traverse – Je répète les mots mandibules – Les mots, qui me disent tout moi, Je les redis dans une mastication sauvage – Un fou parle seul ça me brûle – Un fou parle seul et moi ? Et moi dedans je le répète Je le répète et tout dans moi, Se craque et se dévisage – La cassure est du manque à dire – Du manque à dire – Du manque à dire me bouleverse – Je brûle dedans tête, derrière figure Ça fait un cri coup de bâton – Le cri d’un fou qui se brûlure – Se douloureuse – Se douloureuse – Il hurle le fou, il gueule – Dedans tout moi un fou qui flambe Qui craque du manque partout Du manque à dire Du manque à dire Du manque à dire !
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Un folle parla da solo al posto mio – un folle parla da solo al posto mio, dice ciò che mi manca da dire – parla ad alta voce così forte, mi sento squadrata – parla ad alta voce, e io lo ripeto ripeto le sue parole mandibole – io ripeto – sputo ossa – io ripeto – sputo ossa – aggravo – aggravare spinge i limiti – l’inciso è tremendo – perfetto il tremore – della carenza del dire – della carenza del dire – della carenza del dire che mi tiene in piedi – sto in piedi col silenzio – urlo il grido bianco, la freccia – stritolo il sole tra le mani: la linea frontale attraversa – ripeto le parole mandibole – le parole, che mi dicono tutta me stessa, le ridico in una masticazione selvaggia – un folle parla da solo e ciò mi brucia – un folle parla da solo e io? e io al di dentro lo ripeto lo ripeto e tutto dentro di me, si spacca e si squadra – l’incrinatura è della carenza del dire – della carenza del dire mi sconvolge – brucio dentro testa, dietro volto avviene un grido colpo di bastone – il grido d’un folle che si bruciatura – sì dolorosa – sì dolorosa – urla il folle, strilla – dentro tutta me un folle che avvampa che scricchiola della carenza ovunque della carenza del dire della carenza del dire della carenza del dire!
Da La voix, (Éditions du soir au matin, 2009)
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C’est un vieux cahier d’écriture Je le reprends pour toi. Souvent dans ma tête : Ton prénom. Il tourne en boucle, C’est joli, Et le Perrier, ça fait des bulles – Il y a des écureuils dans le parc, Des écureuils, Le temps… J’écris, Je lis des poèmes et… J’essaie de réfléchir au propre. Je réfléchis : C’est déjà ça. Alors ce vieux cahier d’écriture, Ces choses que je veux près de toi. Moi j’ai la marque sur le poignet, Ça fait comme un léger sourire. A table personne ne parle, A table, on ne parle pas. Les repas à table sont glauques, Et puis… c’est plus profond que ça – C’est la façon de mâchouiller huit minutes La boulette de viande ; C’est la tête qui tremble et puis, Le corps entier… C’est celui qui bégaie, C’est l’autre qui se moque ; C’est moi… qui n’est plus faim. Je repars lire alors – Je t’aime – Les médicaments, les médicaments… Les médicaments j’ai peur de les prendre, Les médicaments, ça me cailloute le ventre : Et puis pareil quand je t’écris : Me répéter 100 fois Ça me cailloute encore : Le Perrier sur la table… Clic-Clac qu’elles font les bulles. Je pense à ta voix : Au téléphone. Je pense, Je ne pense plus. Je ne sais pas qu’elle heure il est. Il n’est pas tard. J’écoute un Cd : De Mauricette – J’ai envie d’être près de toi, Envie aussi de viande rouge. Je t’aime. Ne dis rien, je sais… Ne dis rien… Les bulles de Perrier… Je t’aime : Ça fait des bulles… Celui qu’ici on appelle Moïse A eu des visions aujourd’hui : Il m’a répété 5 fois : J’ai vu un hôtel dans ma chambre. J’ai vu un hôtel / dans ma chambre. J’ai vu / un hôtel / dans ma chambre. J’ai / vu un hôtel dans ma chambre. J’ai vu un hôtel dans ma chambre. Cinq fois qu’il me l’a dit. Cinq fois j’ai pas su quoi répondre – Pareil au bar : J’ai rien pu dire. Quand la fille m’a raconté sa vie : Je n’ai rien dit. Je ne réponds pas. Peu. J’avance – J’avance dans ma tête à soigner la brûlure – A ma psychiatre je dis des choses, Le Perrier sur la table… J’essaie de lui raconter moi… Elle a des yeux bleus ma psychiatre Elle me regarde : moi je n’ose pas. Je regarde le pied de la table. Je dis les choses en regardant Toujours toujours Le pied de table – Mes yeux n’ont plus de courage. Mes yeux sont tout remplis de courants électriques – La nuit, j’ai la gorge sèche. Les médicaments, les médicaments… Je me lève pour baisser le chauffage, Ca me fait tituber les médicaments. Clic-Clac qu’elles font les bulles… Puis je retourne au lit : Je t’aime – Pour dormir je mets des boules quiès. Je les enfonce très très loin dans ma tête : On dit… On dit ça absorbe les bruits et puis, Les cauchemars. Mais la nuit dernière je sais, Ma voisine regardait M6, Et dans ma tête quand j’ai dormi, Un’ femme verrou lançait des haches. Je déteste la femme-verrou : Je sais qu’elle est tapie dans mon crâne, J’ai pitié d’elle, Ça me dégoûte. Elle a un cadenas sur le cœur –
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È un vecchio quaderno di scrittura lo riprendo per te. Spesso nella testa: il tuo nome. Gira di continuo, è carino, e l’acqua Perrier, fa le bolle – ci sono scoiattoli nel parco, scoiattoli, il tempo… scrivo, leggo poesie e… Cerco di riflettere in bella copia. Rifletto: è già qualcosa. Allora questo vecchio quaderno di scrittura, queste cose che voglio vicino a te. Io ho il segno sul polso, agisce come un leggero sorriso. A tavola nessuno parla, a tavola, non si parla. I pranzi a tavola sono glauchi, e poi… è più profondo di così – è la maniera di biascicare otto minuti la polpetta di carne; è la testa che trema; e poi, il corpo intero; è colui che balbetta è l’altro che sfotte; sono io… che non ho più fame. Allora torno a leggere – ti amo – Le medicine, le medicine… le medicine ho paura di prenderle, le medicine, mi piombano il ventre: e poi uguale quando ti scrivo: ripetermi 100 volte mi piomba ancora: la Perrier sul tavolo clic clac fanno le bolle. Penso alla tua voce: al telefono. Penso, non penso più. Non so che ora è non è tardi. Ascolto un CD: di Mauricette – Ho voglia di essere vicino a te, voglia anche di carne rossa ti amo. Non dire niente, io so… non dire niente… le bolle di Perrier… ti amo: fa delle bolle… Colui che qui chiamano Moïse oggi ha avuto delle visioni: mi ha ripetuto 5 volte: ho visto un albergo in camera mia. Ho visto un albergo / in camera mia. Ho visto / un albergo / in camera mia. Ho / visto un albergo in camera mia. Ho visto un albergo in camera mia. Cinque volte me l’ha detto. Cinque volte non ho saputo che cosa rispondere – Stessa cosa al bar: non ho potuto dir niente. Quando la tipa mi ha raccontato la sua vita: non ho detto niente. Non rispondo. Poco. Avanzo – Avanzo nella mia testa per curare la tua bruciatura – Alla mia psichiatra dico delle cose, la Perrier sul tavolo… cerco di raccontarglielo io… ha gli occhi azzurri la mia psichiatra lei mi guarda: io non oso. Guardo il piede del tavolo. Dico le cose guardando sempre sempre il piede del tavolo – i miei occhi non hanno più coraggio. I miei occhi sono interamente riempiti di corrente elettrica – La notte ho la gola secca. Le medicine, le medicine… Mi alzo per abbassare il riscaldamento, ciò mi fa vacillare le medicine. Clic clac fanno le bolle… poi torno a letto: ti amo – Per dormire metto i tappini auricolari. Li pigio molto in profondità nella testa: si dice… si dice assorbano i rumori e poi, gl’incubi, ma la notte scorsa lo so, la mia vicina guardava M6, e nella mia testa quando dormivo, una donna-chiavistello lanciava delle asce. Detesto la donna-chiavistello: so che è rincantucciata nel mio cranio, ho pietà di lei, mi ripugna. Ha un lucchetto sul cuore […]
frammento da Létika Klinik (Dernier télégramme)
traduzione di Viviane Ciampi
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