À la lisière des failles elle voyage parfois se perd trouve repaire blottie dans un litLe noir traversé par le feu souffle vers l'aube le noir n'est plus le noir
Al confine delle fratture talvolta viaggia si perde trova riparo rannicchiata in un lettoIl nero traversato dal fuoco infuria verso l'alba il nero non più nero
Tête qui repose au creux des mots brumeux et roule sur une épauleSilencieuse elle tricote un désordre des plus intimes
Testa che poggia nell' incavo di parole cupe e rotola su una spallaSilenziosa lei sferruzza il più intimo dei disordini
Un mouvement d'incantation frôle les montagnes des arbres tendent leurs ramages au ciel dos courbé elle y cache sa voix mais pourquoi se terre-t-elleIl est des voyages dont on croit ne jamais revenir et dont on ignore où ils ont commencé
Un movimento incantatorio sfiora le montagne gli alberi allungano i loro arabescati fino al cielo schiena curva lei vi ci nasconde la voce ma perché si rintanaVi sono viaggi da cui si crede di mai poter tornare e di cui s'ignora dove sono cominciati
Frottées au mots aux ventres au sexe en colimaçon des encres noires et sanguinesFlambent de nouveau aux chatoiements de la lumière
Strofinate alle parole ai ventri al sesso a chiocciola di neri e sanguigni inchiostriAvvampano di nuovo nel riverbero della luce
Derrière le rideau leurs corps avaient trop souvent célébré la noceTempêtes de perles à tout vent
Dietro la tenda i loro corpi avevano troppe volte celebrato le nozzeTempeste di perle per ogni vento
Femme endeuillée de peaux de louves se recouvre pleurant la fuite du nomade coureur de bonne aventure
Donna in lutto di pelli di lupe si ricopre per piangere la fuga del nomade in caccia di buona ventura
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Da Tomber du jour (Éditions du Noroît, Québec, 1999)
Pourquoi m'avez-vous appelée « Petite chère » ? Dans les entrailles d'une crevasse, j'ai entendu « chair » comme si vous me portiez, et rachetiez ma chute.
Vous, d'une main muette, vous reconstruisiez le jour, et moi, je suis pareille à la lune quand elle ramène le monde vers son berceau. Qu'est-ce qui fait, en moi, hésiter le présent? Qu'est-ce qui n'est ni pensée, ni poésie?
Perché mi avete chiamato «Piccola cara»? Nelle viscere di un crepaccio, ho inteso «carne» come se voi mi sollevaste e riscattaste la mia caduta.
Voi, con mano muta, ricostruivate il giorno, ed io, sono uguale alla luna quando riporta il mondo verso la propria culla. Cos'è che fa, dentro di me, esitare il presente? Che cosa non è né pensiero, né poesia?
Mon corps fuit à toutes jambes une chute d'eau sadique. La pierre bleue que tu m'as offerte s'est volatilisée.
Pourquoi tous ces livres qu'on n'ouvrira jamais. De la chambre au jardin, ils sont des balises (celles qui permettent de remonter vers l'origine de l'absence).
Il mio corpo respinge a gambe levate una caduta d'acqua sadica. L'azzurra pietra che mi hai regalato si è volatilizzata.
Perché tutti questi libri che mai si apriranno. Dalla camera al giardino, sono boe segnaletiche (quelle che facilitano la salita fino all'origine dell'assenza).
Mes désirs se prosternent devant l'hôtel des âmes. Dieu est là en train de jouir. Quand il caresse mon sexe, je retire mes armes de pudeur. Je n'ai plus peur du loup.
Je veux la mort de la bête. Je la prémédite et me voilà humaine. Trop humaine. Mon ivresse sera son cercueil.
I miei desideri si prosternano davanti all'albergo delle anime. Dio è qui e sta godendo. Quando accarezza il mio sesso, ritiro le mie armi di pudore. Non ho più paura del lupo.
Voglio la morte della bestia. La sto premeditando ed eccomi umana. Troppo umana. La mia ebbrezza sarà la sua bara.
Da Le corps en tête (L'atelier des brisants, France, 2001)
Un plein jour de voyelles gronde dans l'arc du guerrier Traverse l'infranchissable
Un giorno intero di vocali tuona nell'arco del guerrieroAttraversa l'invalicabile
Devant la parole hésitante certaines voyelles se dérobent à leur propre réalitéÀ hauteur d'épaule s'éveillent et surprennent le bonheur qui pique du nez
Davanti alla parola esitante alcune vocali si sottraggono alla propria realtàAd altezza di spalle si svegliano e sorprendono l'intorpidirsi della felicità
Au bout du voyage se déchirent à qui mieux mieux dans de sordides venellesDésunissant ce qui les avaient unis se livrent de durs combats sur la place publique s'immolent
Al termine del viaggio fanno a gara nel dilaniarsi in tetri vicoliDividendo ciò che li aveva uniti si abbandonano a tremendi combattimenti sulla pubblica piazza si sacrificano
Mine de rien un son rugit à fendre l'airTerrasse les icônes À genoux la nuit entre dans l'océan pour narguer les amarres
Come se niente fosse un suono ruggisce fino a squarciare l'ariaSbaraglia le icone In ginocchio la notte si addentra nell'oceano per sfidare gli ormeggi
Cet exalté a soûlé de ses mots la merRessac de méfiance qui flotte Dans le crépuscule il a crevé l'œil de la voyelle à la Buñuel
Questo invasato ha stordito il mare con le sue parolerisacca di diffidenza che ondeggia Nel crepuscolo ha cavato l'occhio della vocale alla Buñuel
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Da Chute de voyelles (Trait d'Union - Autres temps, Québec, 2004)
Le réel a trop de dessous et pourtant rien à cacherCherche et ne trouve pas il n'y a que du jour en train de s'évader Chaque pierre est un os de la vieille mer Il faut en frotter sa peau pour sentir le temps
Il reale ha troppe sottane eppure nulla da nascondereCerca e non trova c'è soltanto del giorno in via di fuga Ogni pietra è un osso dell'antico mare bisogna strofinarne la pelle per fiutare il tempo
Chacun de ses mots peut offrir du jour peut manger du cielChacun de ses mots peut me donner jambe et cuisse monter en moi jusqu'en haut
Ciascuna delle sue parole può offrire giorno può mangiare cieloCiascuna delle sue parole può darmi gamba e coscia salire in me fin lassù
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Da Jardin des vertiges (L'Hexagone, Québec, 2002)
J'écris du plus loin de la douleur. Du ventre qui vacille. Il y a quelque chose que je ne comprends pas. Se dérobe une part de réalité Mes mots suivent le trajet des circuits nerveux en de saintes ellipses Si tout m'éloigne de vous, le pacte est rompu. Votre langue fend les lignes, le saccage brise le regard. La peur trouvée entre les draps.
Scrivo da più lontano del dolore. Dal ventre che vacilla. C'è qualcosa che non capisco. Svicola una parte di realtà. Le mie parole scortano il tragitto dei circuiti nervosi in elissi di santità. Se tutto m'allontana da voi, il patto è sciolto. La vostra lingua taglia le righe, il saccheggio spezza lo sguardo. La paura scoperta tra le lenzuola.
Pour qui veut connaître la gueule du poème pieds et torse nus voix rauque et sang chaudEntre des vagues de mots le musicien pinçait les cordes avec fougue et devant une foule au souffle retenu devenait instrument et attente...
Per chi volesse conoscere il muso della poesia piedi e torso nudi voce rauca e sangue caldoTra onde di parole il musicista pizzicava le corde con foga e davanti una folla dal respiro trattenuto diventava strumento e attesa...
Je n'ai plus ni prière ni tourmentsJe n'ai plus de pierre ni de père J'irai plus loin que votre silence
Non ho più né preghiera né tormentoNon ho più pietra né padre andrò più lontano del vostro silenzio
Hier, il n'y avait rien depuis je vois pousser un motDans le roc un cœur bat déchiffre les tensions qui se répandent sous les pas Un homme grimpé à un arbre prêt à se jeter dans le vide répète avec force : « tu es le corps et le sang » Je n'ose aimer le présent qui meurt à l'infini
Ieri non c'era niente da allora vedo spuntare una parolaNella roccia batte un cuore decodifica le tensioni che si spandono sotto i passi Un uomo arrampicato ad un albero pronto a gettarsi nel vuoto ripete con forza: «sei il corpo e il sangue» Non oso amare il presente che muore all'infinito
Nos lèvres intarissables nous rendent chaque fois une poignée de lumièreSecousses dans la nuit éclats de rire comme rythme sonore Sous les étoiles dormantes un chant peut-être en atomes de joie
Le nostre labbra che non tacciono ci restituiscono ogni volta una manciata di luceScosse nella notte risate come ritmo sonoro Sotto le stelle addormentate forse un canto in atomi di gioia
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Da Ailleurs en soi (Domens, France, 2006)
Traduzione dal francese di Viviane Ciampi