MA VALISE
Ma valise connaît toutes les gares du monde.
Je la nettoie, je l’astique.
Elle est en cuir, en cuir
De Patagonie.
Elle m’accompagne dans tous mes voyages.
Un jour nous étions tous les deux,
Face à une rue de Valparaiso.
Je la reconnais à sa forme, à sa façon
De parcourir tous les chemins.
Elle aura bientôt une année de plus.
De trop.
Je n’en sais rien.
Elle m’accompagne depuis toujours.
Elle porte mes chemises,
Un vieux parapluie rouge,
Un chapeau offert en 1960 par mon oncle Dario.
Elle porte mes crayons et mes carnets de poèmes.
Deux ou trois souvenirs sans importance : un peigne
Et un foulard, et un vieux pyjama
Acheté un matin pluvieux au marché de Prague.
LA MIA VALIGIA
La mia valigia conosce tutte le stazioni del mondo.
La pulisco, la lucido.
È di cuoio, di cuoio
Di Patagonia.
Mi accompagna in tutti i miei viaggi.
Un giorno eravamo tutti e due,
Di fronte a una strada di Valparaiso.
La riconosco dalla sua forma, dal suo modo
Di percorrere tutte le strade.
Tra poco avrà un anno di più.
Di troppo.
Non saprei.
Lei mi accompagna da sempre.
Porta le mie camicie,
Un vecchio ombrello rosso,
Un cappello offerto nel 1960 dal mio zio Dario.
Porta le mie matite e i miei quaderni di poesie.
Due o tre ricordi senza importanza: un pettine
E un foulard, e un vecchio pigiama
Comprato un mattino piovoso al mercato di Praga.
JOURNAL D’UNE SECONDE
1.
Je viens d’un pays
qu’on ne saurait
décrire sans
le regard du pélican.
2.
Un pays
où la nuit est
éternelle, ainsi que ses lacs
et ses montagnes.
3.
Un pays fait de lumière
et de pain frais,
d’arbres
au visage
de colibri.
4.
Je viens d’un pays où
tout est arôme,
bruissement des yeux
et volcans
en furie.
5.
Un pays que mes mains
transportent
comme je transporte
la vie
sur les carrefours de
l’exil.
6.
Un pays de fleurs
et d’arbres
en feu.
Un pays
où les vagues
de l’océan
aimantent le soleil
à l’aurore.
7.
Un pays
en forme de poignard,
telle une braise
brûlante dans
la poche.
8.
Je viens d’un pays
qui habite dans une montagne,
de cuivre et d’or
frémissant.
9.
Je viens d’un pays
lointain
que seule ma voix
et mes tempes
pourront reconnaître.
DIARIO D’UN SECONDO
1.
Arrivo da un paese
che non si saprebbe
descrivere senza
lo sguardo del pellicano.
2.
Un paese
dove la notte è
eterna, come i suoi laghi
e le sue montagne.
3.
Un paese fatto di luce
e pane fresco,
d’alberi
dal volto di colibrì.
4.
Arrivo da un paese dove
tutto è fragranza,
fruscio d’occhi
e vulcani
infuriati.
5.
Un paese che le mie mani
trasportano
come io trasporto
la vita
sui crocevia
dell’esilio.
6.
Un paese di fiori
e d’alberi
in fiamme.
Un paese
dove le onde
dell’oceano
magnetizzano il sole
all’aurora.
7.
Un paese
in forma di pugnale,
come una brace
scottante in
tasca.
8.
Arrivo da un paese
che abita in una montagna,
di rame e d’oro
frementi.
9.
Arrivo da un paese
lontano
che soltanto la mia voce
e le mie tempie
possono riconoscere.
PENELOPE
Je te l’ai déjà dit,
tu possèdes les yeux
de l’hirondelle,
mais le monde
est bien plus lourd
qu’une guitare.
*
Il est dimanche
à cet instant précis,
les villes éternuent
dans les cloaques
invisibles de l’aurore.
Demain il fera beau
dans les pattes
de la mouche,
et mon amour
prendra feu
au seuil
de nos adverbes.
*
La mer a balayé les arbres
de cendre et les rochers
flottent maintenant sur les vagues
tell une pieuvre
dans les constellations
amères de nos doutes.
*
Je préfère oublier
les journaux
emplis de colère,
tandis que je vois passer
le tramway
dans le cercle
secret de ma névrose.
*
Un jour nous verrons
les places
vides où agonisent
les pélicans de sel,
heureux de ressembler
à un cadran immobile.
*
Il faudra essuyer nos chaussures
sur le paillasson
de l’aurore,
même si toi, Pénélope,
oublies
de tricoter un magnifique
pullover en l’honneur
de ma mélancolie.
*
Je reste donc ici
à feuilleter les annuaires
des pommiers
avec mon monocle en saphir
et mes cheveux de comète.
*
Cependant, tes mains
m’éclairent de camphre
lorsque le soleil murmure
sa musique d’horloge.
*
Je ne sais pas si le pommier
brûlera au fond des affluents,
mais il est temps d’ouvrir les portes
des anciens calendriers de l’équinoxe.
*
Les nuages ressemblent déjà
à une minuscule grappe de raisin.
Semblable à celle
que les acropoles ont érigée
sur les fenêtres d’Éphèse.
*
Je laisse ici les clés
de notre exil pour que
les apôtres ou les oracles
questionnent un jour
les miroirs à jamais vides.
*
Personne ne pourra
donc nous reprocher
d’avoir oublié les astres,
les seuls
survivants de la mémoire.
PENELOPE
Già te lo dissi,
possiedi gli occhi
della rondine,
ma il mondo
è molto più pesante
di una chitarra.
*
È domenica
in questo preciso istante,
le città starnutano
nelle cloache
invisibili dell’aurora.
Domani sarà bello
nelle zampe
della mosca,
e il mio amore
s’infiammerà
sulla soglia
dei nostri avverbi.
*
Il mare ha spazzato gli alberi
di cenere e le sue rocce
vagano adesso sulle onde
tali a una piovra
nelle costellazioni
amare dei nostri dubbi.
*
Preferisco dimenticare
i giornali
colmi di rabbia,
mentre vedo passare
il tram
nel cerchio
segreto della mia nevrosi.
*
Un giorno vedremo
le piazze
vuote dove agonizzano
i pellicani di sale,
felici di assomigliare
a un quadrante immobile.
*
Bisognerà asciugare le nostre scarpe
sullo zerbino
dell’aurora,
anche se tu, Penelope,
dimentichi
di sferruzzare un magnifico
pullover in onore
della mia malinconia.
*
Rimango qui
a sfogliare gli elenchi
dei meli
con il mio monocolo di zaffiro
e le mie chiome di cometa.
*
Tuttavia, le tue mani
mi rischiarano di canfora
quando il sole sussurra
la sua musica d’orologio.
*
Non so se il melo
brucerà in fondo agli affluenti,
ma è l’ora di aprire le porte
degli antichi calendari dell’equinozio.
*
Le nuvole somigliano già
a un minuscolo grappolo d’uva.
Uguale a quello
che le acropoli hanno eretto
sulle finestre di Efeso.
*
Lascio qui le chiavi
del nostro esilio affinché
gli apostoli o gli oracoli
interpellino un giorno
gli specchi per sempre vuoti.
*
Nessuno quindi
potrà rimproverarci
d’aver dimenticato gli astri,
gli unici
sopravvissuti della memoria.
PAPILLONS
Je ne sais pas pourquoi tu rejettes
la forme
de mon chapeau, car
je voudrais voir le ciel
à travers le pelage d’un tigre.
*
Il faudra rebrousser chemin
avant que le paon
ne nous fasse parvenir
d’ urgence une carte
postale d’émeraudes.
*
Sais-tu que les océans
ont la destinée
d’un navire en flammes?
*
Au-delà de l’horizon
les villes dessinent déjà
les ponts
de l’avenir,
ceux qui multiplient nos
jours meilleurs
dans les montagnes
peuplées de cierges.
*
Il ne nous reste donc que les papillons
de l’Île de Pâques, et tous
ces jardins où méditent
les moais ivres de colère.
FARFALLE
Non so perché rifiuti
la forma
del mio cappello, poiché
vorrei vedere il cielo
attraverso il pelame di una tigre.
*
Bisognerà invertire la strada
prima che il pavone
ci faccia arrivare
d’urgenza una cartolina
postale di smeraldi
*
Lo sai che gli oceani
hanno il destino
di una nave in fiamme?
*
Al di là dell’orizzonte
già le città disegnano
i ponti
dell’avvenire,
coloro che moltiplicano i nostri
giorni migliori
nelle montagne
popolate di ceri.
*
Ci rimangono quindi solo le farfalle
dell’Isola di Pasqua, e tutti
quei giardini dove meditano
i moais ubriachi di rabbia.
QUELQUES INDICES SUR TA BOUSSOLE
Tu voudrais être une pomme,
un arbre,
une branche,
une feuille pour parcourir le monde
à dos de bécasse.
Pour apercevoir ces ruelles
et ces impasses où
dorment, très souvent,
des mendiants sans lumière.
Pour voir ainsi ces magasins
de cerises ou d’allumettes,
ou de joailleries noctambules,
ou de marchés de coléoptères,
qui hébergent encore
des bistrots certainement ineffaçables.
Tu voudrais être cette source
qui éclaire le monde
du chêne
de lumières infinies.
La rivière qui se nourrit
seulement de nuages
et de pluie et d’hirondelles.
Le galop mélodieux de nos rêves
qui dessine au loin les royaumes
et les villes de fumée.
Tu voudrais être une aile
de pélican, une étoile qui
éclaire la mer avec toutes ses étoiles,
A jamais invisibles, et le vent oublié
par les boussoles, mais aussi
par les archipels de syllabes.
ALCUNI INDIZI DELLA TUA BUSSOLA
Vorresti essere una mela,
un albero,
un ramo,
una foglia per percorrere il mondo
sulla schiena di una beccaccia.
Per intravedere queste stradine
e questi vicoli dove
dormono, molto spesso,
mendicanti senza luce.
Per vedere così questi negozi
di ciliegie o di fiammiferi,
o di bigiotterie nottambule,
o mercati di coleotteri,
che ospitano ancora
bettole certamente incancellabili.
Vorresti essere quella sorgente
che rischiara il mondo
della quercia
di luci infinite.
Il fiume che si nutre
soltanto di nubi
e di pioggia e di rondini.
Il galoppo melodioso dei nostri sogni
che disegna in lontananza i regni
e le città di fumo.
Vorresti essere un’ala
di pellicano, una stella che
illumina il mare con tutte le sue stelle,
per sempre invisibili, e il vento dimenticato
dalle bussole, ma anche
dagli arcipelaghi di sillabe.
CAFE SAINT-LAZARE
Je dis adieu à ces murs en faïence
qui encerclent la ville de leur ruban en velours,
tandis que je lave mon corps
pour attendre l’aurore.
Je dis au revoir au Café Saint-Lazare
où j’ai survécu au dernier tremblement
d’un papillon en déroute.
Je pars donc, quelque part,
sans nulle autre richesse que mes vieilles
godasses, imprégnées de boue,
à cause de cet hiver pluvieux.
*
J’emporte ces journaux
que je garderai
jusqu’à l’éternité pour les montrer
à Dieu et lui raconter que cette ville existe.
Je dis au revoir aux moineaux
endormis sur l’asphalte, ainsi
qu’aux ouvriers sans travail
qui bâillent dans les rues
et les faubourgs, le jour du Grand Guignol.
Je dis au revoir aux culs-de-jatte,
car eux, uniquement eux, et les
borgnes, ont un esprit
cartésien qui ferait rougir
même les plus amnésiques.
*
Je dis au revoir aux dames
qui gentiment m’ont montré les murs
de cette ville et leurs dentelles, et
cette fleur que le soleil effeuille
un peu avant l’automne.
(Avignon, 2011)
CAFE SAINT-LAZARE
Dico addio a questi muri di maiolica
che accerchiano la città con i loro nastri di velluto,
mentre lavo il mio corpo
per attendere l’aurora.
Dico arrivederci al café Saint-Lazare
dove sono sopravissuto all’ultimo tremore
di una farfalla smarrita.
Quindi me ne vado, da qualche parte,
senza null’altra ricchezza che le mie vecchie
scarpe, impregnate di fango,
a causa di questo inverno piovoso.
*
Porto i giornali
che conserverò
fino all’eternità per mostrarli
a Dio e mostrargli che questa città esiste.
Dico arrivederci ai passeri
addormentati sull’asfalto, così
come agli operai senza lavoro
che sbadigliano per le strade
e i sobborghi, nei giorni del Grand Guignol(*)
Dico arrivederci agli storpiati,
poiché loro, solo loro, e gli
orbi, hanno l’animo
cartesiano che farebbe arrossire
anche i più smemorati.
*
Dico arrivederci alle signore
che cortesemente mi hanno indicato i muri
di questa città e i loro merletti, e
questo fiore che il sole sfoglia
un po’ prima dell’autunno.
(Avignone, 2011)
(*)Teatro parigino che utilizzava il macabro, il cruento. Inoltre, Guignol è anche una celebre marionetta di Lione, nota per la sua irriverenza nel deridere i potenti (NdT).
PAQUEBOT DU PACIFIQUE
J’ai tout perdu
dans un grand paquebot du Pacifique :
un astrolabe, un cadran solaire, une poignée de pièces
en or,
ainsi que quelques lettres anciennes,
écrites par une femme
que je n’ai jamais oubliée.
J’ai aussi perdu une valise en cuir,
Qui était presque une partie de ma maison,
mon ombre, celle qui ouvre mille portes
en même temps, la moitié
d’une couronne du soleil.
Aujourd’hui, il me reste le sable chaud
qui loge dans mes poches,
quelques cartes de navigation et
cette odeur d’iode que mes narines sentirent
– si je me souviens bien –, un soir
d'hiver
dans le port de Buenos Aires ou de Valparaiso.
NAVE DEL PACIFICO
Ho smarrito tutto
in una grande nave del Pacifico:
un astrolabio, un quadrante solare, un pugno di monete
d’oro,
insieme ad alcune antiche lettere,
scritte da una donna
che non ho mai dimenticato.
Ho smarrito anche una valigia di cuoio,
che faceva quasi parte della mia casa,
la mia ombra, quella che apre mille porte,
nello stesso tempo, la metà
di una corona di sole.
Oggi, mi resta la sabbia calda
che annida nelle mie tasche,
alcune carte di navigazione e
questo odore di iodio che le mie narici percepirono
– se ben ricordo –, una sera
d’inverno
nel porto di Buenos Aires o di Valparaiso.
ODE AU VOYAGEUR
Pour être franc avec toi, moi aussi je suis un grand
voyageur,
car je viens d’un pays
où les nuages en furie sont toujours blancs
sur la houle du Pacifique.
Sur les rochers, les pélicans font la sieste
tandis qu’au loin une jeune femme pauvre
(et semblable au pain frais
que l’on pétrit derrière les montagnes de Valparaiso)
fait sécher son linge blanc,
blanc comme les nuages
de cet océan
remplis de mouettes et de rochers et de brume.
Je sais bien
que tes yeux de poisson ressortent déjà
de tes orbites, au moment
où l’horizon nous dessine un paquebot.
Il paraît que Ruben Dario vit ce port lointain
un jour
qu’il faisait soleil sur la baie, lorsqu’une femme
toujours belle à la fenêtre
de la vie
lui lança un regard
de diamant sur le poignard du crépuscule.
Les marins descendaient du paquebot
en chantant. Eux
qui avaient parcouru Marseille,
Gibraltar
et Liverpool.
Heureusement que les tavernes sentaient le vin
ancien et la bière fraîche, derrière
ce grand rideau rouge où l’amour était à jamais une proie.
«Nous avons traversé le Canal de Panamá!»,
lançaient-ils à ceux qui buvaient et chantaient au rythme
d’un piano.
Il est bon temps de revenir d’un long voyage,
mais c’est bien différent lorsqu’on quitte le port.
Les mouettes te poursuivent
à travers le grand large, puis
les dauphins font parfois la route avec toi.
Tu vois passer les albatros
et ces baleines bleues qu’on croise souvent
derrière
les grosses vagues,
à la hauteur du Sénégal, mais aussi
au Détroit de Belle-Isle, et parfois près de Corner Brook.
ODE AL VIAGGIATORE
Per essere sincero, anch’io sono un grande
viaggiatore,
poiché arrivo da un paese
dove le nuvole infuriate sono sempre bianche
sotto i marosi del Pacifico.
Sotto le rocce, i pellicani fanno la siesta
mentre di lontano una giovane donna povera
(e simile al pane fresco
che s’impasta dietro le montagne di Valparaiso)
fa asciugare i suoi panni bianchi,
bianchi come nuvole
di questo oceano
colmo di gabbiani e di rocce e di brume.
So perfettamente
che i tuoi occhi di pesce escono già
dalle orbite, nel momento
in cui l’orizzonte ci disegna una nave.
Pare che Ruben Dario vide questo porto lontano
un giorno
di sole sulla baia, quando una donna
sempre bella alla finestra
della vita
gli lanciò uno sguardo
di diamante sul pugnale del crepuscolo.
I marinai scendevano dalla nave cantando. Coloro
che avevano percorso Marsiglia,
Gibilterra
e Liverpool.
Per fortuna le taverne odoravano di vino
antico e birra fresca, dietro
questa grande tenda rossa dove l’amore era per sempre una preda.
«Abbiamo attraversato il Canale di Panama!»,
inveivano a coloro che bevevano e cantavano sul ritmo
di un pianoforte.
Il tempo è quello giusto per tornare da un lungo viaggio,
ma è molto diverso quando si lascia il porto.
I gabbiani ti perseguitano
attraverso l’immensità, poi
i delfini talvolta ti affiancano sulla strada.
Vedi passare gli albatros
e quelle balene azzurre che spesso s’incrociano
dietro i marosi,
all’altezza del Senegal, ma anche
nello Stretto di Belle Isle, e talvolta vicino a Corner Brook.
COMÈTES
Je marche dans cette forêt
pour oublier la couleur
du corbeau.
Les arbres me poussent,
ainsi que la pluie et
le huemul passe, derrière
moi, telle
une comète enivrée.
Il est temps de voir la lumière
de cette maisonnette, où dort
un chat
enroulé, au bord
d’une cheminée
semblable à un bateau en partance.
COMETE
Cammino in questa foresta
per dimenticare il colore
del corvo.
Gli alberi mi spingono,
così come la pioggia e
passa l’huemul(*), dietro
di me, come
una cometa ubriaca.
È tempo di vedere la luce
di questa casetta, dove dorme
un gatto
acciambellato, sull’orlo
di un camino
simile a una nave in partenza.
(*)Mammifero delle Ande a rischio di estinzione (NdT).
RIVIÈRES
Je repose mes mains dans cette source
et l’eau purifie mes mains et mes ongles.
Je repose mes mains dans cette source
et mes mains sentent passer dans leurs veines
la musique du monde.
Je repose mes mains dans cette source :
ces longues branches
sèches, ces feuilles couleur de cendre.
Je suis l’arbre, la clarté de l’aube.
FIUMI
Riposo le mie mani in questa sorgente
e l’acqua mi purifica mani e unghie.
Riposo le mie mani in questa sorgente
e le mie mani sentono passare nelle loro vene
la musica del mondo.
Riposo le mie mani in questa sorgente:
questi lunghi rami
secchi, queste foglie color cenere.
Sono l’albero, la chiarità dell’alba.
PRIÈRE DU JEUNE POÈTE
à Emily, Elsa et Juliette
Aiguise ton crayon, tes yeux et ta mémoire. Fais de toi un pont et non pas une tanière de poisson-chat. Ouvre ta fenêtre. Efface toujours la dernière voyelle de tes écrits. Regarde derrière toi et avance. Demande pour les absents. Ne te contente jamais d’une seule accolade de sable. La trace est importante, mais rappelle toi des arbres millénaires. Atteins le puits pour abreuver ta soif. Marche. Ne crains pas la vipère qui entoure tes jambes. Prends le poignard ou la pelle. Parle à haute voix. Résiste. Éloigne-toi du guépard. Vole-lui son élan. Toute démarche doit te conduire à un pont-levis. Ne perds pas de vu la mer. Elle est ta boussole. Surveille l’horloge. Éloigne l’ombre qui t’aveugle. Les rues te surprendront. Pour chaque oubli le feu effacera son étoile de sel. Sois à l’heure. Lutte contre le loup qui habite ta cervelle. Tout reflet aura la vertu de ne pas être toi. Avance. Ton combat ressemblera à une énorme palissade. Prends cette passerelle. Le condor observe déjà ta prouesse de rocher. Il n’y a rien à voir, dit le vers de terre. Entre la forge et la braise, il y a toi. Comme l’enclume tu zigzagues sur un chemin de ronces. Trace ta route, donc. Tout paysage est trompeur.
PREGHIERA DI UN GIOVANE POETA
a Emily, Elsa e Juliette
Appunta la tua matita, e gli occhi e la memoria. Fa’ di te un ponte e non una tana di pesce-gatto. Spalanca la finestra. Cancella sempre l’ultima vocale dei tuoi scritti. Guarda dietro di te e avanza. Informati degli assenti. Non accontentarti mai di un solo abbraccio di sabbia. La traccia è importante, ma ricordati degli alberi millenari. Attingi il pozzo per dissetarti. Cammina. Non temere la vipera che circonda le tue gambe. Prendi il pugnale o la pala. Parla ad alta voce. Resisti. Allontanati dal ghepardo. Rubagli lo slancio. Ogni passo deve condurti a un ponte levatoio. Non perdere di vista il mare. È la tua bussola. Controlla l’orologio. Scaccia l’ombra che ti acceca. Le strade ti sorprenderanno. Per ogni dimenticanza il fuoco cancellerà la sua stella di sale. Sii in orario. Lotta con il lupo che invade la tua mente. Ogni riflesso avrà la virtù di non essere te. Avanza. Il tuo combattimento somiglierà a un’enorme palizzata. Prendi questa passerella. Il condor osserva già la tua prodezza di roccia. Non vi è niente da vedere, dice il verme. Tra la forgia e la brace, ci sei tu. Come l’incudine tu ondeggi s’un sentiero di rovi. Traccia la tua strada, quindi. Ogni paesaggio è ingannevole.
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